LA CRYO-EXTRACTION, EN PRINCIPE

 

 

 

 

 

Nous allons examiner ensemble

les principes

qui soutendent la cryo-extraction,

d’un point de vue pratique.

 

 

 

 

 

 

 

1. Ach, les fameuses lois de Raoult, au pluriel.

 

Elles nous disent :

. loi de la cryométrie (= loi de Blagden ) : si on dissout une substance (soluté) dans un liquide (solvant), la solution obtenue voit son point de congélation s’abaisser. Et cet abaissement est proportionnel à la quantité de soluté présent. En langage scientifique on dit « à sa fraction molaire ».

La cause doit en être cherchée dans ce qu’on appelle les « propriétés colligatives » de la solution, c’est à dire celles qui dépendent du nombre de particules dissoutes et non de leur nature. Cela ne s’applique donc pas, ou alors avec une correction pour le degré d’ionisation, aux solutés qui sont des électrolytes.

Cette loi permet des applications analytiques intéressantes : en mesurant l’abaissement du point de congélation d’une solution donnée, on peut déterminer la concentration du soluté dissous. Notez au passage l’aberration de la grammaire française (dissous au masc., mais dissoute au féminin). Ce n’est pas une raison pour ne pas respecter l’orthographe.

A contrario, la détermination de l’abaissement du point de congélation d’un soluté dont la concentration serait connue permet de déterminer son degré d’ionisation.

On nous a demandé de faire tout cela en 1974-5 (1ère année à la fac). Je revois encore le labo. J’étais TRES mauvais et ne dois mon succès immérité qu’à l’intervention d’une assistante du prof. de chimie ... bien disposée à mon égard.

Pour la petite histoire, Blagden, lui, était un assistant du célèbre Cavendish. Il ne m’a jamais donné de petit coup de pouce.

 

. loi de l’ébulliométrie : elle dit la même chose, sauf que cette fois c’est l’augmentation du point d’ébullition en fonction de la concentration du soluté qui est pris en compte. Plus il y a de soluté présent, plus tard la solution va se mettre à bouillir.

 

. loi de la tonométrie : ça, c’est déjà plus compliqué à comprendre. C’est l’abaissement relatif de la pression de vapeur qui est égal à la fraction molaire du soluté. Pour nous aider intuitivement – enfin, moi c’est mon approche – je me force à réaliser que la pression de vapeur de la solution est inférieure à celle qu’elle aurait si elle ne contenait aucun solvant, si elle était pure. Toi y en a pigé ? Donc, plus tu mets de sel dans le fait-tout, moins les pâtes essaient de soulever le couvercle !

 

Evidemment, ces propriétés colligatives jouent aussi pour le point de fusion, et pour la pression osmotique. Mais ça, ce ne sont pas les lois de Raoult et donc on s’en tape !

 

 

2. La loi de Raoult, au singulier

 

Celle-ci énonce : « La pression de vapeur d'une solution idéale est dépendante de la pression partielle de chaque constituant et de leurs fractions molaires respectives ». Elle parle donc à peu près de la même chose que la loi de la tonométrie, sauf qu’elle ne s’adresse pas à un soluté dans un solvant, mais bien à deux liquides mélangés entre eux. En outre, leurs proportions doivent être d’un ordre de grandeur similaire. En fait, c’est encore une de ces lois à la con qui ne ressemblent à aucune réalité, comme celles des fluides à flux laminaire (Poiseuille etc...). L’urine au passage de la prostate, l’EPO dans une seringue du Tour de France, le vin dans une pompe à la cave ... c’est toujours turbulent.

 

 

3. Qui est Raoult ?

 

Il y a d’abord François Raoult, un Brestois né en 1985 qui ne remporte pas les émissions qui dénichent des vedettes ( !!!) à la télévision auxquelles il participe. Il arrive même à se faire coiffer par Luce, l’aide-soignante catalane venant de Peyrestortes, à côte de l’aéroport de Perpignan.

 

Et puis il y a François-Marie Raoult (1830-1901), notre thermodynamicien. Lui non plus ne sera jamais « Nouvelle Star » mais il gagne en 1900 le titre de Commandeur de la Légion d’Honneur, chacun son truc. Il ne le défendra qu’un an, malheureusement.

 

 

4. Et la cryo-extraction, alors ?

 

C’est sur la base de la première loi de Raoult que fut développée la technique de cryo-extraction.

 

En fait, ce n’est pas vrai. Les vignerons franconiens furent amenés à pressurer une vendange gelée en 1794, cela ne date pas d’hier. Pour mémoire, votre Bonaparte est arrêté avec les frères Robespierre la même année, après qu’il ait commandé l’armée d’Italie. Mais il était trop petit (1,66 m) pour être guillotiné, lui. Dommage pour l’humanité. On a aussi des témoignages écrits en 1846 à Traben-Trarbach (Moselle).

 

A partir du 19ème siècle, d’autres régions d’Allemagne – notamment le Rheingau - élaboraient régulièrement du Eiswein quand le climat le permettait.

 

Quel est le processus opératoire ?

On aura compris que plus une solution est riche en matières dissoutes, plus tardivement elle gèlera. Donc, quand une vendange reste sur pied alors qu’il gèle – 7°C (ou plus bas encore), les baies les moins riches en sucre (parce que moins perméables du fait de la non-attaque du botrytis, ou parce que moins passerillées pour toutes sortes de raisons) vont geler et se solidifier, les autres demeurant plus juteuses. Si on vendange dans cet état-là et qu’on pressure, seules les baies les plus riches donneront du jus (une espèce de mélasse bien souvent) alors que les autres, dures comme des cailloux, resteront intactes à la fin de la pressée. On peut d’ailleurs les récupérer, les laisser remonter en température et en faire autre chose par après.

 

Artificiellement, par un procédé mécanique (compresseur) ou cryogénique (gaz industriels liquéfiés) - les frigoristes disposent de toutes sortes de techniques – on congèle à une température dépendant du type de concentration qu’on veut obtenir les grappes de raisin cueillies « en bloc ». A partir d’un niveau de concentration de sucre (mais aussi d’autres composants, on a vu que c’est « colligatif ») donné, certaine baies ne vont pas se solidifier. Si on foule et qu’on pressure à ce moment-là, elles vont donner du jus, tandis que les autres ne pourront pas le faire, l’eau étant cristallisée. Bien sûr, les paramètres de foulage et la pression appliquée détermineront aussi le jus obtenu.

 

Il va de soi que cette technique, appliquée à une vendange sélectionnée, par tries ou, comme dans le cas de certains Trockenbeerenauslese et Eiswein en Allemagne ou en Autriche, par découpage des grappes aux ciseaux s’il le faut, permettra d’aller encore plus loin. Mais on comprend aisément que, plus la température est abaissée, moins on obtiendra de jus et plus il sera concentré.

 

Après, ce jus fermentera comme tous les autres moûts de même richesse.

 

 

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Commentaires: 1
  • #1

    Juicers Reviews (dimanche, 21 avril 2013 23:01)

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