J’AI MONTRÉ PATTE BLANCHE POUR DU VIN NOIR

(Photo © C. Civale)
(Photo © C. Civale)

 

 

L’autre soir, avec l’ami François, et avec Isabelle, mon palais brilla de mille feux : « C’est un Quarts de Chaume d’environ 10 ans d’âge, dis-je, et il est excellent ».

 

 

 

 

Erreur, c’était en fait un Saint-Lambert 2004 du Domaine Pithon. Mais même la Civale me regardait avec un soupçon d’admiration, tout habituée qu’elle soit à ces « devinettes » perpétuelles. Quand on connaît l’excellence des vins de

« Jo les rouflaquettes », que j’aie pris celui-ci pour un de ses cousins plus prestigieux, et ce totalement à l’aveugle, n’avait rien de honteux.

Par contre, j’ai déclaré plus tard au cours du même repas « carignan jeune » un ... 100 % malbec de 2009 : minable !

  

 

Or, j’aime – beaucoup – les vins de Cahors. Souhaitant me racheter, j’ai quitté samedi matin le Lion d’Or, dans la grisaille qui se levait, pour rallier la route de Souillac, puis la belle Sarlat. Le marché hebdomadaire battait son plein, malgré des températures à peine supérieures au zéro pointé, mais un soleil doré et radieux rendait la « pierre de France » de la cité phare de ce Périgord Noir encore plus photogénique. Dieu que c’est beau, le pays de la truffe, de la poule faisanne et des petits châteaux appartenant aux Britanniques ! D’ailleurs, dans les rues que bordent les échoppes des forains, les chevelures sont souvent blondes ou même auburn et les accents sont anglo-saxons. Les toilettes sont « chic » et les prix des boutiques rappellent plus Savile Row ou The Strand que le Tati du Boulevard Rochechouart.

 

Le cabas rempli de confits, les bourses – c’est comme ça qu’on appelle un « sac plastique » à Perpignan – gonflées de noix fraîchement récoltées, de pommes reinettes et de pruneaux séchés, nous avons ensuite regagné la voiture direction Gourdon, Catus, Trespoux et enfin Villesèque. Il s’agit d’un tuyau de David Cobbold, qui m’a « branché » sur le Clos Troteligotte et m’a servi de recommandation. Il m’a fourni mes lettres de créance en quelque sorte, alors que ma propre banque rechigne à m’octroyer celles de crédit.

Dans les années ’80, j’étais client chez la « Calamity Jane » de Cahors, au Domaine des Savarines, situé un peu plus loin dans la même zone de ce causse calcaire que j’affectionne pour la finesse de ses vins. Les sols sont ici argilo-calcaires bien entendu, ressemblant à la Champagne par l’apparence, et contiennent par endroits des oxydes de fer leur donnant des colorations rouge-brun, comme on en voit en Afrique du Sud ou bien dans les Ruffes de chez nous (sols fersiallitiques).

 

Le papa, Christian Rybinski – qui m’a reçu – a vu pas mal de pays avant de revenir au sien et de développer à partir de 1987 la partie viticole d’un domaine familial, avec la ferme intention de « faire de la bouteille » et de privilégier la qualité et l’AOC, choix que tous n’ont pas fait à l’époque, préférant inonder des jus du merlot plus productif les linéaires de la GD. Depuis une dizaine d’années, son fils Emmanuel se consacre surtout à la vente et la promotion de la marque.

Son frère, associé au début, gère à présent une autre branche de l’exploitation, tournée vers le porc fermier de grande qualité et les produits dérivés – je ne parle pas que des nitrites (ouh, le vilain !).

 

Ici, le malbec règne en roi. La parcelle que vous apercevez en toile de fond de l’excellentissime portrait que Christine a tiré de nous couvre dix hectares d’un seul tenant. Comme M. Rybinski me l’a dit avec humour : « L’avantage, c’est qu’on n’oublie pas d’en vendanger une ! ».

Elle montre des zones d’hétérogénéité permettant de différencier les nombreuses cuvées du domaine. Le site vous renseignera à ce sujet (voir ICI).

 

En ce qui me concerne, je suis reparti avec un carton de la cuvée « K or »,

un 100 % malbec sans bois neuf qui exprime à merveille la finesse un rien métallique du cépage et y ajoute du gras et une belle complexité en finale, le tout à un prix très attractif. Je pense que ce vin va devenir mon « Cahors de tous les jours ». J’ai aussi emporté quelques bouteilles de leur sommet de gamme, obtenu en gardant les raisins de la meilleure zone (épamprage soigneux, éclaircissage puis gros travail sur l’arbre feuillaire) et en les vinifiant à la mode « haute couture ». Pour l’élevage, 12 mois de barriques neuves assouplissent les tannins avant de terminer le tout en cuve. Le bois ne se perçoit pas, en ce sens qu’aucune vanille, ni eucalyptol parasitaire, ne vient ternir la pureté du fruit mais la finale est réellement souple et fluide. Très joli travail. J’espère pouvoir échanger quelques Loute ou quelques Casot pour m’assurer que cette cuvée dormira à l’avenir dans ma petite cave perso.

 

Vous vous demanderez peut-être pourquoi ce blog, qui figure sur le site d’un domaine viticole – le mien en l’occurence – parle tant du vin des autres. La raison en est simple : tous les amis vignerons passionnés que je me suis faits par le passé m’ont servi eux aussi le vin des autres lorsqu’on passait à table. Ici, je bois beaucoup de Coume Majou, quasiment tous les jours. J’estime pourtant qu’une bouteille de rouge consommée sur deux est étrangère au domaine.

 

On n’élabore des vins complexes et attirants que si on s’est au préalable établi une « bibliothèque » des goûts et des parfums. Pour cela, il convient d’en déguster beaucoup, et je continue à entretenir cette diversité organoleptique.

 

 

Un jour, je ferai un billet établissant un catalogue des vins que j’aime.

Pour l’heure, dans le vignoble de France, contentez-vous de lire

qu’il me faut à tout prix du Cahors, du Madiran et du Bandol

en plus des nectars de l’Agly,

et que le Cornas, un pinot noir « solide »

(plutôt Gevrey, Corton ou Pommard),

les Cairanne ou Rasteau et sans doute un Chinon construit

constituent une base de travail acceptable. Cela vous convient-il ?

 

 

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