UN PEU DE PUB POUR LE DOMAINE DE LA COUME MAJOU

Le Rosé 2011 et Cruels "deu mil wit"
Le Rosé 2011 et Cruels "deu mil wit"

Une fois n’est pas coutume, je voudrais faire le panégyrique de deux de MES vins.

Quoi, de la pub

- direz-vous !

Si on veut, sauf qu’il s’agit de deux produits marginaux, presque confidentiels et obtenus par le plus grand fait du hasard. J’espère que ma mère ne lira pas cette chronique : elle croit que je suis devenu vigneron pour faire fortune et qu’il suffit d’attendre encore un peu.

 

 

En fait, j’espère évidemment vivre de ce métier, et le plus vite sera le mieux, mais j’ai surtout embrassé cette activité comme thérapie à ma langueur et mon sentiment d’inutilité, pour me procurer des sensations fortes liées à la terre et, modestement, à une forme de création, moi qui n’ai aucun talent artistique. La nature a été avare en octobre 1956.

 

 

1. LE ROSÉ DE COUME MAJOU 2011

 

Le rosé a vu le jour comme un pis-aller, à la fin septembre (sic !!!!) 2005. Ma cave n’a été fonctionnelle que le 19 septembre 2005 pour la bonne raison que c’est ce jour-là qu’on m’a livré .... les premières cuves de vinification. Il est aussi difficile à un vigneron de travailler sans elles qu’il ne le fut pour Mike Brant de voler sans ailes. Bon, moi je ne prends pas de LSD.

Et le 19 septembre 2005, la vigne de syrah tout en haut du lieu-dit Alt de Coume Majou avait déjà les peaux flétries et « pesait » plus de 15 degrés potentiels. En outre, les sangliers avaient commencé leur oeuvre de glouton et on sentait par-ci par-là comme une trace de .... légère acescence (= acétate d’éthyle), résultat de leur grignotage désordonné. J’avais donc décidé de ne PAS la vendanger.

 

Mon oenologue, Laurent Duret, qui déteste – cela je l’ai découvert plus tard avec bonheur – les vins « à peu près », mais n’aime pas non plus le gaspillage, m’a incité à élaborer du rosé, ce qui n’entrait pas dans mes plans. On a donc vendangé ma vigne de macabeu – à maturité correcte – et on a également ramassé tous les raisins blancs qu’on trouvait au hasard des autres vieilles parcelles, complantées jadis avec quelques blancs pour élaborer du Rivesaltes. C’était l’habitude. On a aussi vendangé quelque centaines de kilos du carignan le plus frais et ... on a trié cette syrah, ne gardant que le meilleur. Heureusement, je dispose d’un excellent pressoir, vieux (1988) mais de qualité (Bucher pneumatique).

Résultat : un rosé « foncé », autour de 13 degrés, archi-sec (80 jours de fermentation à basse température !), aux arômes cerisés et au corps agréable, sans amertume mais, soyons francs, manquant un peu de fraîcheur et de vivacité. On ne tartrique pas les vins à la Coume Majou.

Le lot a eu ses amateurs et, anecdote, la buvette de la piscine Nemo à Drogenbos (33 m de profondeur pour la plongée) a été son meilleur client. John, son concepteur, habite dans un château d’eau qu’il a retapé, paraît-il. Je ne sais s’il buvait du rosé là-haut aussi, pour faire bonne mesure.

 

Mais je fus pris par la gageure et, hormis une « année sans », je tente d’élaborer du rosé à chaque millésime à présent, mais en vendangeant quand MOI je le décide, et non la nécessité : au tout début septembre.

 

Le Rosé de Coume Majou 2011 contient donc essentiellement de la syrah, cette même parcelle, dont je vendange le tiers supérieur aux alentours des 12 degrés potentiels. Cette année, j’ai pressuré ce raisin avec ce qu’il restait de marc après le pressurage du blanc, c à d sans avoir vidé le pressoir, qui est grand assez

(27 hl). Les raisins blancs, de maturité magnifique, ont dû contribuer environ 5 % de jus à l’ensemble. J’ai débourbé à froid très longtemps (48 heures) en prenant soin de garder une atmosphère riche en gaz carbonique et j’ai lancé la fermentation autour des 20 degrés centigrades. Une fois les levures «goed bezig » (bien lancées), j’ai baissé la température un peu et ... obtenu au bout du compte un rosé sec, archi-sec comme les messieurs de Val Duchesse. Il n’a pas fait sa fermentation malo-lactique – je ne l’aurais pas laissé faire d’ailleurs, non mais – et on l’a mis en bouteille après une filtration stérile mais avec un minimum de SO2. Cela, la capsule à vis aide à la réaliser. Les expériences ont montré qu’on perd moins de 1 mg/l de SO2 libre par an avec ce système et on peut donc ajuster « pile-poil » à la mise, sans surdoser par précaution.

 

A la dégustation, outre la robe « cerise clair », typique de la syrah, on trouve un nez ouvert, sur le fruit et sans aucun côté amylacé ni oxydatif. Je n’aime pas trop cela. En bouche, surprise, le corps est dense malgré le faible degré alcoolique et l’absence de tannins. Je pense que l’apport de cette « rebêche » de vieux macabeu, aussi faible soit-il, y contribue largement. La finale n’est absolument pas astringente ni amère ... sauf si on laisse traîner la bouteille.

 

Quoi, me direz-vous, qu’est-ce que cela veut dire ?

Par hasard, on a oublié dans la porte du frigo une bouteille de dégustation à moitié entamée. Je l’ai redégustée au bout de 4 jours et ... le nez n’avait rien perdu. Par contre, une légère amertume était apparue en fin de bouche. Généralement, personne ne laisse traîner du rosé entamé au frigo. Chez moi d’ailleurs, même quand Moderaçion nous accompagne, il est rare qu’une bouteille entamée ne traîne, peu importe laquelle.

 

Vous aurez compris que je suis content de mon bébé. Comme toute médaille a son revers, il n’existe qu’en quelques centaines de cols, réquisitionnés par la clientèle Horeca locale de Christine et par ... ma mère ! En outre, mes agents sur Bruxelles et en Flandres proposent une belle gamme de rosés à prix compétitifs dans des régions plus traditionnelles pour ce type de vin et je ne pense pas qu’un Roussillon rosé, de petit rendement et forcément plus cher, finisse par être importé en Belgique.

Nous en vendrons par contre au domaine ... tant qu’il en reste.

 

 

2. CRUELS

 

Kezako ? Le Rec d’en Cruels, vallon parallèle à la Coume Majou sur la route qui va d’Estagel au Col de la Dona, ne compte plus d’autre propriétaire que votre serviteur, alors qu’il regorgeait de terrasses à Rivesaltes il y a 20 ans.

Un « Indien » ayant appliqué sa vision déformée du bio – c à d ne rien faire – sur tout le versant opposé a flingué ses dernières vignes en l’espace de trois ans. Quant à mes vignes, elles sont la proie des sangliers, sur des vieilles terrasses et un coteau de schiste brun assez à l’ombre, donc mûrissant lentement. J’y possède du carignan (1950), du macabeu (1950) et un peu de grenache gris (1935). Tout travail doit être manuel et le coin était infesté d’oïdium (merci, voisin). J’ai perdu toute ma vendange la première année mais, grâce à des soins jaloux depuis lors et un traitement d’hiver soigné à la bouillie nantaise (pas bordelaise), on n’a pas à se plaindre à présent.

Or donc, en 2008 j’avais décidé de ne pas garder le blanc pour élaborer mon rosé et de le cueillir TRES tardivement pour en faire un peu de Rivesaltes ambré. Mes adorables amis du Domaine de Rancy à Latour de France, Brigitte et Jean-Hubert Verdaguer, qui produisent LE meilleur ambré du département et ont un stock de vieux vins datant de l’époque où ils travaillaient avec le papa (et même avant), décédé récemment, m’avaient prodigué tous les conseils et fournis deux barriques aptes au vieillissement (dont une cadurcienne).

Mais Porcus singularis en a décidé autrement et Christine et moi-même avons vendangé à nous deux en moins d’une matinée le petit peu que ces cochons de malheur avaient abandonné. On l’a égrappé à la main – quelle corvée ! – et j’ai encuvé environ 225 litres, avec les peaux, comme un vin rouge. Au bout de 5 jours, le vin prenait une teinte légèrement orange (le grenache gris) et j’ai préféré décuver pour ne pas extraire des flavonoïdes sans intérêt gustatif, même si les gourous des anti-oxydants vantent leurs mérites à tout-va. On a pressuré à la main le petit chapeau et réincorporé cette presse et ... j’ai attendu que la fermentation veuille bien s’arrêter.

Il nous reste environ 55 gr de sucre par litre et, comme c’est un « Vin de Table », on est juste en-dessous des 15 vol % en alcool. Une vendange bien mûre donc.

 

Au début (mise stérile et sulfitage prudent mais pas excessif), le vin restait TRES alcooleux mais plaisant. Et puis, de six mois en six mois, il a commencé à montrer son vrai visage : le sucre se fond, l’alcool ne brûle pas et des arômes de mirabelle et d’abricot apparaissent, signant la surmaturité bienvenue. Récemment, il a tenu tête à un dessert réunissant une pâte bourgeoise, un « custard au citron » et une meringue à l’italienne encore onctueuse.

 

Ce petit Cruels n’existe plus qu’en 250 exemplaires de 50 cl environ

et il faut nous supplier à genoux pour en obtenir un flacon.

Si un jour j’arrive à mettre la main sur un peu plus de vigne blanche,

je retenterai l’expérience, mais à dessein cette fois !

 

 

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Commentaires: 3
  • #1

    LEVI, Salvator & Catherine (vendredi, 24 février 2012 11:03)

    Monique nous incite à consulter ton site et pénétrer ton blog.
    Un peu surpris de voir ta chambre à coucher en ouverture et désolé de la voir sans vie, un peu d'animation propre à un tel lieu eut été bienvenue. Songes-y! Avons passé une bonne journée hier à nous trois à Sluis où ta maman a tout de suite repéré Le magasin d'alcools (extra) <<apour acheter del'Izzara qui -pas de chance- manquait justement. A+! amicalement

  • #2

    Luc Charlier (vendredi, 24 février 2012 12:03)

    Merci à tous deux de votre intérêt. Cela m’ôte une BRIQUE de l’estomac. Catherine appréciera en connaisseuse, je crois.
    Soucieux de satisfaire mes amis, même si leur chalandise est incertaine, j’ai rectifié le tir.
    Voir http://coumemajou.jimdo.com/2012/02/24/la-pipe-à-martin/#permalink

  • #3

    Cheap Foamposites (mardi, 20 mars 2012 10:40)

    Wow, my god! Incredible articles. Really is well written.